Salut l'Ami(e) ! Permets-moi un préambule.
"Ah ! Quand même, Dame Jo, tu t'décides ! C'est-y qu'tu
s'rais devenue manchote" ?
J'imagine le sourire qui mord de Tromph, de Flo et de quelques autres ...
Après la Tromph partie,
la balade des Sudistes
... et mon silence. .
Pas eu le temps d'écrire, tout simplement. Et pourtant, la colonie
de lopettes franco-suisses sur
les routes ardéchoises dans le camion jaune gentiment prêté
par Tromphette, fin Février 04, cela valait son pesant
de cacahouètes. Le rendez-vous avec les cascades gelées, le
Gerbier-de-Jonc sous la neige, la marche dans le vent,
la chaleur de l'accueil à l'Immac, c'était rien que du bonheur.
Et pourtant, la journée ensoleillée de Mars, sur nos terres
du Sud, qui de Lourmarin, nous mena au pied du Ventoux
puis aux gorges de la Nesque, à Simiane-la-Rotonde, Rustrel, c'était
pas bien, ca ? Que si ! Que si !
Cette fois, ayant retrouvé mon falzar en cuir, j'étais de
nouveau SDS. Je n'ai rien oublié. Une balade n'efface pas les précédentes.
Après ce mea culpa, Re-Salut, l'Ami(e) !
Si tu le veux, rejoins les mousquetaires à St Céré,
fin Avril 04.
Les zuns roulant avec les zôtres, ça forme une étoile
pour rejoindre le Couvent de la Visitation, qui nous hébergera.
Est-ce que tu vois Marco, chaperonné par Zazzz et Séverine
jardinant sur les petites routes tandis que Frapi, Pascal, Ghislain pestent
dans le brouillard à la sortie de Lyon, sous la flotte. Jolitorax
et Flyben s'offrent le Vercors et les
Gorges de l'Ardèche. Vois Le Philo, Dame Jo, Man
et Christelle qui virolent en Lozère. Des noms marrants font rire
les SDS, Balsièges et Changefèges : des histoires de cul,
en somme. Du côté de Mende, il fait gris. Pas chaud du tout.
Heureusement, au fur et à mesure qu'on approche du Quercy, le ciel
se fait plus bleu et le soleil réchauffe. Une vache alpiniste en
herbe ... nous fait bien rire.
Accueillis au couvent par Frère Flat et Soeur Florence, nous nous sentons une âme
de pensionnaires farceurs,
en ces lieux pleins de charme. Escaliers aux marches de bois, craquantes
à souhait, longs couloirs, arcades, parc haut herbu, plein de vieux
arbres ... où je serai souvent fourrée, ces jours-ci, lorsque
nous sortons, le matin, avant le départ
en vadrouille, ou le soir au retour. De là, on a une très
jolie vue sur les Tours sombres du château médiéval
de St Céré,
perché sur sa butte. Mais aussi sur les collines environnantes, où
les merisiers tendent leurs blancs bouquets de mariées.
"Qu'est-ce qui est fleuri tout blanc ?" Le Philo s'émeut.
Il a raison : c'est superbe.
Que de sérénité, au couvent ( ...quand les mousquetaires(-airesses)
n'y organisent pas de
réveillon-à-sono-gueule-que-veux-tu, le Samedi soir après
l'turbin ! ...) Dans le parc, un enclos voit cohabiter
deux coqs à cou nu et une belle biquette au pelage beige et brun,
qui accourt dès que tu t'approches.
Des lilas sauvages poussent près des hauts murs ...
Qu'on m'oublie là et j'y reste !
Rappelle-toi ce que viens d'écrire; un peu plus loin, tu auras comme
une impression de déjà lu.
La troupe arrive. Enfin Francis, qui va planter sa tente dans le seul emplacement défriché.
Pourquoi camper ?
Pour ronfler à l'aise ? Par désir de grand air ? Besoin de
solitude ? Il ne fait pas encore bien chaud, la nuit ...
La suite nous montrera une Bête des Vosges qui s'est pelée,
la 1ère nuit. Le lendemain, ça ira mieux : couverture(s) ?
bizarre(s) ?
Comme toujours, les retrouvailles sont joyeuses. Le grand Marco, songeur devant le calme des lieux tourne
mystique
et se met à évoquer ses nombreux péchés, s'il
décide d'aller à confesse. Je lui propose un nom de baptême
approprié : Frère Marco de la Longue Liste, auquel, après
un coup d'oeil à sa plaque d'immatriculation quelque peu chantournée,
je préfère ( lui aussi ) Frère Marco de la Plaque à
la Retourne ( " la plaque aux Emmerdes " dixit ce coquin de
Pascal V., n'ayant pas l'heur de plaire à l'intéressé.
)
Soeur Jojo des Mésanges (c'est moi) bise ses potes et potesses, retrouve
Dédé ! Tout le monde s'en va dîner dans l'ancienne chapelle.
Le lendemain, Samedi, il fait grand beau. Tom qui propose à ceux
qui l'aiment le suivent, de rouler tranquilou pour une balade bucolique,
mène une douzaine d'entre nous à la rencontre du Célé
(un affluent du
Lot) et de ses trésors, en passant par Assier, où un château
imposant garde la vallée.
C'est blond, vert mousse. Vaporeux. La rivière sinue; l'on découvre,
ébloui(e), sur l'autre rive,
le prieuré d'Espagnac -Ste-Eulalie, comme une invite à voyager
dans le temps. Du bois brun, de la briquette, un
clocheton pointu. Lors d'une pause, l'unanimité se fait pour retourner
en arrière et découvrir pour de bon les lieux.
Pédibus cum gambis.
Pèlerins du moment (Espagnac est une étape sur la
route de Compostelle), nous n'en finissons pas d'admirer l'harmonie de la
construction. Dans le village, une haute statue de bois, hommage au pèlerin, invite à
rechercher le calme intérieur.
Il fait bon. La falaise, sur l'autre rive, renvoie la chaleur. On n'entend
que les chants d'oiseaux et la rivière qui "cascaye"
(joli mot provençal) Frapi et moi, au bord de l'eau, imaginons le monde sans
voitures, sans motos ...
Dieu ! que tout but devient alors éloigné !
Qu'on m'oublie là et ... que j'y reste ! (Bis)
Maisons quasi troglodytiques, accolées à la paroi rocheuse
blonde ou grise, villages aux toits bruns artistiquement
travaillés, tout est beau, dans cette région. Le Philo et
moi retrouvons Rocamadour,
tant aimée, visitée tôt, à pied,
un matin d'été, il y a quelques années. La plupart
des copains pique-niquent déjà dans le grand pré que
l'on a
fané récemment. Il fait faim. Tom
sort de sa valoche une de ces terrines maison ! On ne se fait pas prier
pour y goûter.
A l'abri des hautes falaises, le pré concentre la chaleur. Il rend
fou, le soleil printanier et l'ombre est encore rare, sous les érables,
au bord de l'eau ... S'étendre ... Peser de tout son poids sur la
terre, avec le ciel bleu au-dessus de soi ... Les siesteux
ne résistent pas, foulard ou casquette sur
la tête. Dame Jo caresse les arbres et écoute l'eau ...
" Cascaïa ... Cascaïa" ... Tiens ! On dirait un petit
cairn !
C'est bien plus charmant encore : comme une offrande aux elfes. Des enfants
ou des poètes - c'est pareil - ont édifié une borie
miniature avec du bois et des pierres plates, ainsi que son cabanon. Et
l'ont décorée de bouquets roses et jaunes. Je pense à ces
vers de la Renaissance.
" A vous, troupe légère,
Qui, d'aile passagère,
Par le monde, volez,
J'offre ces violettes,
Ces lis et ces fleurettes ... "
Décidément, qu'il fait chaud ! Un tas de foin sec est le
bienvenu. Je me laisse aller, sans dormir, bercée que je suis par
la rivière et les conversations des copains.
L'après-midi nous offre encore tout plein de villages agréables.
Les SDS, un peu fourbus, ne sont pas fâchés d'aller s'étendre
à la Visitation. Tandis que les gars mécaniquent.
Repas gastronomique, ce soir ! Ambiance garantie. Cela démarre tôt
et fort (la sono), trop fort : on ne s'entend plus, sous les voûtes
qui accentuent les sons... Comme les enragé(es) prennent leur pied,
on ne peut leur en vouloir, on n'est pas pisse-froid. Peu à peu,
c'est comme dans la Symphonie des Adieux : tout le monde ou presque, se
retrouve
dehors, sous une belle nuit étoilée, à admirer le clair
de lune et à raconter des histoires. Quelques membres d'un groupe
de randonneurs se joignent à nous, admirent les motos. L'une des
nénettes a son permis.
Tandis que Dédé puis d'autres copains prennent la route du
retour, le Dimanche matin, Le Philo, Laurent G. et moi, partons jardiner,
passant par Sousseyrac, la Tronquière, La Capelle Marival, nous arrêtant
au Lac du Tolerme. Nous avons rendez-vous à Scelles,
près de Flaujac-Gare, pour y déguster un repas local avec
tous ceux qui ont encore le temps.
Il fait toujours grand beau. Frais mais pas froid. Et soudain c'est le bonheur
absolu. Imagine un bout du monde, un hameau heureux, un p'tit restau
qui ne paie pas de mine, à la cambrousse.
On est dans "Jour de Fête", avec François, le facteur
expert du biclo. Jacques Tati n'est pas là mais son ombre bienveillante
nous accueille, " chez Bienvenue" au " Repos des Roulottes".
A propos de François, nous en avons un : Frapi, aux anges, qui me
fait remarquer une, puis trois puis X bagnoles pleines de pépés-mémés,
de familles qui débarquent : tous du Lot.
C'est donc que l'endroit est réputé.
Si tu savais ! Imagine une salle toute simple aux poutres sombres, une
grande cheminée avec son chaudron qui n'est pas là pour le
décor, de longues tables sur lesquelles on a déjà posé
le pain et le vin. Et pas n'importe lesquels : un pain rustique et goûteux,
coupé en gros chanteaux. Un cahors pas piqué des hannetons.
Peu à peu ce sera plein à craquer, là-dedans ! Des
pépés qui nous tournent le dos mangent devant la cheminée.
Le patron a belle allure, tout en noir, avec une longue
chaîne et sa croix. Ce n'est pas un farfelu folklo mais un vieux monsieur
très jovial, le teint pâle, de grandes rides lui donnant des
airs de statue.
Béate, j'ai l'impression de retourner voir mon grand-père.
L'enfant Jo
est bien, mais bien !
Qu'est-ce qu'on mange ? De la soupe aux choux, avec force tartines bien
trempées. Et le chabrot, alors ? Seul, Pascal V. observe la tradition,
au grand dam du patron. " Ben M'sieur ! On n'peut pas : on va rouler
! "
Après les entrées, où l'on doit se battre avec d'épaisses
tranches de jambon de pays, arrivent ensuite, des plats de succulentes pommes
de terre et de moelleuse volaille au vin.
Fromage puis dessert, penses-tu ... Que nenni ! Effarés, nous voyons
arriver du rosbif. Au cas où nous aurions encore un petit creux ...
Toute cette jeunesse (je parle des copains), faut qu'ça mange !
Que va dire la patronne, qui assure en cuisine, si les plats reviennent
pleins ! Peu à peu, nos rangs s'éclaircissent.
Départs. Au revoir ! A la NC toute proche, fin Mai !
Aux petits chèvres ronds de Rocamadour succède ... la plus
merveilleuse tarte aux pommes, caramélisée, parfumée
d'un alcool de fruit, que j'aie jamais dégustée. Ce n'est
pas du bluf : je cuisine beaucoup, tu le sais.
C'est léger, cela fond dans la bouche. Un délice !
Le meilleur est à venir, qui ne se mange ni ne s'achète.
Sortis pour saluer Pascal et Frapi, qui vont s'en retourner, Le Philo et
moi découvrons enfin " l'Arlésienne" du Lot : Odile,
la patronne, qui nous a si bien mitonné le repas. 72 ans, toute menue,
elle est sortie prendre l'air et regarder les motos. Elle n'en a jamais
fait : elle a bien trop peur ! Mais son mari et elle-même ont été
photographiés devant une belle machine de motards belges. Le restaurant
" Chez Bienvenue " existe depuis 1903, créé par
le grand-père d'Odile. C'est ouvert tous
les jours !
Soudain, Odile me dit : "C'est bien que vous fassiez de la moto". (sous-entendu : à votre âge) Et elle me plante sur les joues deux énormes baisers, que je mets aussitôt dans mon trésor de trésors qui ne s'achètent pas.
Qu'on me laisse là et qu'on m'y oublie ! (Ter)
Merci Kiki et Jérôme, de nous avoir fait vivre de tels moments !
Un peu plus tard, ayant à notre tour pris congé d'Odile et
des copains, heureux veinards, nous prolongeons le jardinage en Aveyron,
où nous attendent nos cousins, dans leur vieille bastide. Et
nous racontons, et nous racontons, toujours sous
le charme d'instants parfaits.
Qu'on se le dise : en Quercy comme en Aveyron, les gens sont chouettes !
Nous avons reçu pas mal de monde, après notre retour à
Manosque, ce qui nous a fait revivre encore les balades des mousquetaires.
J'ai écrit à Odile, bien sûr !
Salut l'Ami(e) ! Reçois des bises.
Et si t'es nostalgique, va donc quelque jour saluer l'Odile à Scelles
Restaurant Montal-Bienvenu,
Le Bourg
46320 Flaujac-Gare
Tel 05 65 40 56 04
Et déguste lentement sa tarte aux pommes, en pensant un peu à
Dame Jo, l'embéguinée d'la moto
P.S.
1) Un salut en passant à mes nouvelles connaissances : Françoise, Papy Pat ( qui a réussi à me faire goûter un excellent rhum ), Noël ( gag : à Rocamadour "les WC étaient fermés de l'intérieur") et Freddy.
2) Z'avons dégotté, Le Philo et moi, chez nos cousins, un pré jaune de pissenlits où nous avons imaginé Zazzz et sa Ducat'.